Qu'est ce que l'effacement énergétique ?
Un peu d'histoire..
En France, c'est dès les années 50 que des contrats d’effacement de consommation électrique sont souscrits entre EDF et des industries « hyper-demandeuses ». En contrepartie d’un allègement tarifaire, elles s'engagent à pondérer leur demande les jours de l’année établis par l’opérateur historique. Précisons que cela est imaginé dans un contexte antérieur à la massification de la production nucléaire alors que notre production hydraulique nationale connaît un manque de linéarité dû aux variations saisonnières. Il faudra ensuite attendre les années 2000 pour que des sociétés proposent des contrats aux particuliers. C’est enfin avec la hausse récente et forte du prix de l’énergie que le concept d’« effacement diffus » prend un nouvel élan beaucoup plus médiatique.
Comment ça fonctionne ?
L’effacement diffus (car imperceptible) de consommation électrique est un concept qui consiste à réduire ou à interrompre temporairement (quelques minutes) la demande électrique des appareils énergivores. Il se fait chez des particuliers volontaires qui se chauffent par l’électricité. Un boîtier branché sur les équipements souhaités communique avec un agrégateur situé dans le tableau électrique, lui-même piloté à distance par la société installatrice.
Lors des pics de froid en hiver, quand les pointes de consommation d’électricité risquent de provoquer des délestages ou encore quand il faudrait mettre en service des moyens de production coûteux pour répondre aux besoins, les boîtiers déclenchent des coupures momentanées pour soulager le réseau électrique.
Les détracteurs de la promesse initiée par l’effacement arguent qu’il s’agit en réalité d’un décalage de consommation plutôt que d’une suppression, puisqu’il faut récupérer plus tard les degrés dont l’installation a été privée.
Pour Quelle création de valeur ?
La valeur marchande des économies
L’équipement est gratuit et contractualisé avec le particulier pour une durée habituelle de 3 ans. En conséquence, le business modèle des « effaceurs » repose sur le fait que ce sont les économies réalisées sur la consommation d’électricité qui sont revendues au Réseau de Transport d’Électricité (RTE). Ainsi, la rémunération s’opère par la vente de la consommation évitée en période de pointe, c’est-à-dire au tarif le plus élevé.
Un modèle gagnant-gagnant ?
Pas tout à fait.. car :
› Chaque Mwh effacé est rémunéré par un prélèvement supplémentaire sur les factures de tous les usagers d’électricité via la Contribution du Service Public de l’Électricité (CSPE).
› Chaque Mwh effacé n’est pas acheté et fait baisser le chiffre d’affaires des fournisseurs (EDF, Engie…) qu’il faut également indemniser…
Une mécanique complexe
Biais entre subventions et prix élevés
Les dispositions du Code de l’énergie prévoient que les effacements activés peuvent être vendus directement sur les marchés de l’énergie par le mécanisme dit de Notification d’Échange de Blocs d’Effacement (NEBEF). En clair, l’opérateur d’effacement peut vendre l’énergie effacée sur les marchés, comme s’il l'avait produite ou achetée lui-même, sans pour cela devoir en référer préalablement au fournisseur ni obtenir une quelconque autorisation de sa part.
Il existe donc un biais entre l’électricité effacée (actuellement encore subventionnée en France par l’État au titre du bouclier tarifaire) et revendue aux enchères sur les marchés par les opérateurs d’effacement dans un contexte de prix de l’énergie élevé (baisses d’approvisionnement en gaz russe, prix de gros de l’électricité corrélés en partie sur les prix du gaz dont une partie est produite par des centrales au gaz en Europe, moindre disponibilité du parc nucléaire français et baisse de la production hydroélectrique du fait de la sécheresse historique).
Les limites du business model
Les bénéfices de l'effacement diffus : une illusion pour les ménages équipés
Au final, les bénéficiaires du procédé d’effacement diffus ne sont pas les ménages équipés. Non seulement, ils ne sont pas indemnisés pour avoir été « vertueux » en acceptant de différer leur consommation, mais ils vont devoir s’acquitter de la rémunération versée à « l’effaceur » et de l’indemnisation due aux fournisseurs sur leur facture d’électricité !
L’effacement consiste en un report des consommations, ce n’est pas un dispositif d’économies d’énergie. C’est seulement par les indications de consommation relevées par le boîtier que les usagers sont invités à se modérer.
Pour lisser les consommations d’électricité, il serait plus judicieux d’encourager l’effacement au moyen de tarifs incitatifs ou d’une rétribution des comportements « citoyens » répondant à la modération de la demande dans l’intérêt collectif. Les Français vertueux bénéficieraient directement de leurs efforts.
La vision ogga
De notre côté, chez OGGA, nous appelons à privilégier ce qu’un réseau de distribution intelligent devrait être :
› Aller dans le sens de l’efficacité énergétique globale
› Proposer des économies réelles et compréhensibles simplement par tous
› Délivrer des informations exhaustives pour permettre le choix d’un opérateur en toute conscience
› Envoyer des signaux de variations de prix aux usagers pour adapter leur consommation
› Se reposer sur des équipements capables de retarder automatiquement leur démarrage pour effacer une pointe
› Rémunérer ceux sur qui repose l’effort
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